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Écrits de Marc Hodges
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14 octobre 2010

La citerne, 6 heures 33

A chaque rencontre solitaire se mêle comme une grande douceur, rencontre d'un arbre isolé ou d'un animal sauvage qui s'immobilise un instant en silence. André Pagès attend la venue de quelque chose d'indistinct. Il est impuissant à maîtriser le magma de sensations qui se bousculent dans son esprit. Le monde est là, il en fait partie. Peu de couleurs, aucune exubérance, le plateau refuse de se dévoiler. Un vieux chien noir-blanc le suit comme une ombre, seul son halètement rythme le temps. Il ne doit rien écarter de lui. Il se demande quel avenir n'aura pas lieu? Il s'arrête de nouveau. De loin en loin, un bout de pré cerne une lavogne desséchée. Il voudrait pouvoir décrire toutes les formes de ce monde. Que ce soit trop plein de soleil, pluie ou brouillard, l'espace se dilue dans l'espace. De petits nuages passent dans le ciel. Seules les mouches l'accompagnent sans crainte. Quelque chose vacille en lui, qui touche aux racines mêmes de sa vie. Le paysage est minéral.

Il sait ce qu'il est, d'où il vient ; il sait son être. Ici tout s'enfonce dans la clarté. Le poète doit être un professeur d'espérance. Il regarde et se fige. Il aime tout ce qui a le regard clair et qui parle franchement. Dans les lointains tremblés de soleil du plateau, le sol est d'une grande pâleur, tous les tons exténués s'étalent à perte de vue. Dans sa timide pudeur, la vue bronche, se dérobe. Triolet de basson. Il faut passer lorsqu'on ne peut plus aimer. Il rêve que les hommes ont abandonné les contrées où la vie était dure car ils avaient besoin de chaleur. Il se souvient fort bien de tout ce qui s'est passé. Il est difficile de vivre avec les hommes car il est difficile de garder le silence. Il recommence à marcher. Il ne vit que s'il relie. Un nuage le pénètre de son ombre. Il voudrait compter l'infinité des pierres des murs. Il s'étonne de ce silence qui s'épaissit à l'intérieur de lui-même, comme une brume blanche acide le lavant un peu du misérable tourment de ses préoccupations habituelles. Le ciel est lisse comme une pierre de lavoir. Des ombres rapides et brusques courent sur les herbes sèches.

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