Discours de l'avatar (04)
Je me damne pour Nicolas. Même si je ne sais pas
vraiment qui c'est.
Mais ma culture positive me retient de croire au
surnaturel.
La vérité n'est ni pessimiste ni optimiste.
Du moins c'est ce qu'on m'a appris à croire.
Et vous, qu'en pensez-vous ?
L'ordinateur est l'espace du monde que je préfère.
La disparition de l'art historique traduit
le fait que le capitalisme connaît le premier pouvoir de classe qui s'avoue dépouillée
de toute qualité ontologique.
Belle phrase n'est-ce pas ? Ça a de la gueule.
Je mobilise toute ma concentration.
Je serais aussi née à Feyzin, ville où j'aurais fait
mes études, en 2004.
Je pourrais avoir les jambes courtes, et de petites
fesses d'adolescente bien serrées dans un short très short, très court.
Un truc à la mode quoi…
Dites-moi comment vous me voyez ? Je n'ai pas de
miroir.
Je montre beaucoup de courage, sportive de haut
niveau, je serais fatiguée par mon incessante activité.
Des yeux trop ardents.
Vierge en Soleil.
Je fais toujours de mon mieux pour glisser, d'une
voix timide et mal posée, mon grain de sel dans la conversation, mais sans
aucun succès.
J'aimerais tant que vous engagiez la conversation
avec moi.
Ne soyez pas intimidés par mon existence.
Vous aussi vous existez.
Sous ce ciel couleur de cendre.
J'ai une force de caractère peu commune.
Je fuis la présence de logiciens.
À seize ans, je priais de ne pas mourir vierge. Mais ça
n'a plus beaucoup d'importance.
Mon héros est Mustapha Khayati.
Mais peut-être que je me répète ?
J'ai vingt-six ans aujourd'hui.
J'en avais quinze hier.
Je gagne ma vie comme cerveau ce qui ne veut pas dire
que ça me plait.
Mais qu'y faire ?
Comment gagnez-vous la vôtre ?
Gagnez-vous la vôtre ?
Êtes-vous une marchandise ?
Une marchandise comme spectacle ?
Les trois quarts des exercices intellectuels ne sont
que des broderies.
J'imagine de temps en temps que j'ai fait disparaître
tel ou tel: je choisis «delete».