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Écrits de Marc Hodges
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20 mars 2009

Dans la combe de Combechave, 13 heures 32

Bréauté a toujours vécu ici, n'est jamais parti, n'a jamais connu autre chose, il le pense, le croit. Cette heure est pour lui toute la bénédiction du jour. Il ne vient personne, il faut tout mettre au passé… C'est un lieu d'adieux. Le décor se met en place. Un vieux chien noir-blanc le suit comme une ombre, seul son halètement rythme le temps. Bréauté aspire à tout ce qui peut arriver, marche sans jamais s'arrêter, sans se retourner, personne ne peut dire où il va. Il aime espace, buissons, souvenirs, il est là, change de place sans bruit, n'est rien qu'œil et oreille, prend sa couleur des choses sur lesquelles il repose. Tout lui parle, il parle à tout. Il entend tous ceux qui ont nourri son enfance de paysage, de ciel et de terre. Plissements. Les pierres innombrables sont autant de complices à son désir de bonheur. Il ramasse quelques brindilles. Qu'il soit aujourd'hui, demain ou qu'il ait pu y être hier n'a pas grande importance, toute seconde enferme le temps complet et pour cela ignore les hommes. Un petit oiseau vole devant lui, pas plus gros qu'une tâche d'ombre sous l'une quelconque des fleurs du paysage.

Ses rêves se mêlent à la réalité. Le coassement d'un corbeau trahit l'épaisseur du calme. Bréauté se promet de ne pas être dupe de toute cette beauté, de la force apaisante des lignes, s'oblige à penser à la mort que cela représente aussi, mais, malgré lui, une tranquille plénitude le gagne. Il est dans une sorte de station incompréhensible de l'esprit. Il boit avidement la volupté de voir. Seules les mouches l'accompagnent sans crainte. Aussi loin que puisse remonter la mémoire des hommes, ses oncles, son frère, son père, son grand-père, ont arpenté ce sol cherchant la paix de l'âme. Poursuite du bonheur… Il rêve que tout pourrait encore changer… L'espace paraît soudain sensible, clair et liquide, comme une chose que l'on pourrait absorber, boire. Le paysage est figé dans l'attente. Il est là, change de place sans bruit, il n'est rien qu'œil et oreille, prend sa couleur des choses sur lesquelles il repose. S'il lui faut s'abuser, il aime mieux que ce soit dans le sens de la confiance. Les friselis de l'air lui semblent parfois des souffles. Sans rêves, que pourrait-il comprendre du monde?

Trop absurdement profondes, les vallées sont autant de frontières. Le sentier sinue, à l'ombre, entre deux pentes; des buissons de noisetiers, des sapins, le bordent.

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