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Écrits de Marc Hodges
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25 septembre 2007

La Garde, 18 heures 17

Le rythme court des genévriers creuse l'espace, l'air est frais et léger comme une eau fine, dans sa timide pudeur, le décor bronche, se dérobe, Bréauté fuit soigneusement les rares silhouettes humaines qui s'esquissent sur l'infini du plateau. Il rêve de douter sérieusement de l'existence, tente toujours de se prouver qu'il est bien vrai qu'il vit. Le silence l'attire - lui fait peur… Un oiseau qu'il suit du regard, le chemin qui continue et se perd dans l'espace, le remplissent d'un sentiment d'évidence pensive. Son cœur est triste jusqu'à la mort de nostalgie et d'anxiété. Les pierres méditent sous la lumière. Tout est désert. Il respire… L'énormité du silence sonne comme une cloche sombre. Une plante jaune au bord d'un talus, une espèce de sauge, brille au soleil, solitaire dans la lumière. Il aspire à tout ce qui peut arriver. Dans sa mémoire des voix enfantines s'appellent. Il aime genévriers, murmures, collines. L'herbe est rare et cassante.

Sa conscience d'exister s'accompagne de la crainte de mourir. L'herbe n'est verte que dans les creux. L'espace paraît soudain sensible, clair et liquide, comme une chose que l'on pourrait absorber, boire. Le décor se met en place. Dans l'immobilité approfondie ne bougent que de vagues touffes d'herbes. Dans ce désert-paysage il regarde marcher ce vieux paysan bossu chez qui, enfant, il aimait tant aller boire une limonade, transforme ce qui existe en fonction d'un avenir possible qu'il aimerait rendre probable, s'installe au cœur des choses: il a la nostalgie au cœur. Il sait que le plateau ici a tout d'une image.

Il y a une antiquité vénérable dans les gestes des hommes. Toute chose a deux visages: le visage de ce qui passe, le visage du devenir. Il voudrait que son regard soit un flux de rayons, que résonne dans son corps un monde d'harmonies, cherche la terre et sa lumière bleue dont on lui a tant parlé. Terre de ses ancêtres… Lui viennent à l'esprit des expressions stupides et rabâchées : "mer herbeuse, vallonnements tranquilles, houle des collines…". Il y a quelque chose en lui qui est de demain, et d'après-demain, et de l'avenir. Le bruit de ses pas ne sonne plus déjà que dans le souvenir. Il cherche dans la solitude le chemin qui mène à lui-même.

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