Repas d'affaire
Wilfrid vit Zabre se diriger vers le bar et dire quelques mots à une très joile blonde jeune fille qu’il n’avait encore jamais vue dans l’hôtel. Il pensa : ne s’embête pas… et monta les escaliers. Quelques secondes. Zabre le rejoignit dans le couloir, le mena à sa chambre sans rien dire. Entrèrent, s’assirent, parlèrent de choses nulles — la grève en Nouvelle Guinée, la bombe atomique en Iran, la faim dans le monde, le réchauffement climatique, la déroute américaine en Irak, la mort des phoques et des baleines, l’impôt sur la fortune…— attendirent le garçon, commandèrent :
Zabre : langoustines, moules marinières, sole sauce hollandaise, fruits
Wilfrid : langosutines, moules marinières, lotte à l’armoricaine, trois crêpes (double blé noir confiture de myrtilles — ce qui lui permettait d’atteindre le cap des 310 chiffre qui, sur le moment, lui paraissait indispensable)
Mangèrent en parlant toujours d’autre chose — refonte de la gauche oui, bien sûr mais comment, taxes sociale sur la valeur (de quoi) ajoutée (à qui) — c’est si difficile de juger la valeur réelle des gens — autoroutes, automobiles, autosatisfactions, autontimonourémos. Ce n’est que le café servi que Zabre, audace du ventre plein, parla de ce qui le préoccupait : je pense que si X… vous a confié sa canne, c’est que vous êtes de ses amis, dit-il fouillant ses poches.
Très flatté de passer pour l’ami d’un savant, Wilfrid ne le contredit pas.