Euphorie dans la cathédrale
Les applaudissements
n’en finissent pas…
De l’escalier du
clocher, tenant son bandeau à la main, sort discrètement le jeune scout blond.
Un des boutons de son polo rouge, aupravant soigneusement boutonné, est tombé
de son vêtement mais, dans l’enthousisme général, personne n’y prête attention,
sauf (peut-être) X… à qui rien n’échappe et qui, aussi digne que la statue de
Saint-Yves continue à prendre des notes sur son petit carnet noir.
Tous alors se
précipitent sur Jim Wollans ; tous veulent l’embrasser, lui toucher la
main ou, à défaut les vêtements. Dans la cohue, une jeune beauté arrache un
bouton de sa chemise, alors chacun veut une sainte relique et l’on se dispute
âprement ses habits : bientôt il est nu comme Adam et les assistants
doivent se contenter de lui faire signer des autographes sur n’importe quoi. Un
jeune scout se fait tatouer une dédicace sur le bras, une jeune nymphe brune
offre son corsage immaculé, la fille publique tend un billet de 100 euros… Les
enfants, enfin, peuvent hurler sans crainte, leurs parents prenant pour de un
saint enthousiasme ce qui n’est qu’un jeu. Les scouts se débandent derrière les
caquetantes guides sous l’œil naïf et attendri des cornettes émues par le
rythme sensuel des chants primitifs de cette Afrique où elles ont de nombreuses
missions. Dans cette euphorie générale, la vente des disques marche à plein et
le camion livré le matin même est acheté en un instant.
Un groupe de bien
pensants d’âge respectable, entoure la baronne de Lacroix-Turpin partie en
croisade pour obtenir de son féal Yann de Guillet de Laforce-Latour, ci-devant
curé de la paroisse, la consécration d’une chapelle à ce nouveau prophète et la
tripière, enthousiaste, montrant sa sainte érudition, ose même prononcer le mot
« messie ». On convient qu’une délégation ira trouver le garde-champêtre,
qui pour lors surveille la vente des disques, afin qu’il accepte de lever un
impôt destiné à cette fondation d’utilité publique.