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Écrits de Marc Hodges
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19 mai 2006

L'existence est une connerie

On ne tenait donc rien, même pas l’enfant d’ailleurs, ce fut une fausse couche; on était mariée à un employé ordinaire, sans plus, payé juste au-dessus du smig. Il avait bien fallu trouver un travail… Les gosses étaient venus plus tard, beaucoup plus tard, en deux douloureux paquets de deux.

D’année en année, la situation des parents Zabre avait empiré, la faillite — inévitable — était venue et Zabre, sans qualification professionnelle, s’était retrouvé chômeur: seule elle avait entretenu la famille. C’est alors que, à vingt cinq ans, déjà désœuvré, trop paresseux pour vraiment chercher un autre métier, trop peu audacieux pour essayer de créer quelque chose, il s’était, par hasard, intéressé à l’alchimie — peut-être simplement à cause du vieux laboratoire de l’entreprise et de quelques livres abandonnés par son frère après sa fuite en Égypte (quoi qu’il en soit, les relations des causes et des effets ne présentent pas un grand intérêt pour ce récit) — et ne voilà-t-il pasque, à partir de cette distraction, il rencontre d’autres passionnés, découvre que le monde existe hors de sa famille, qu’on le prend au sérieux, qu’on l’écoute, qu’on discute sérieusement ses propositions après las avoir vraiment examinées… Désastre, gâchis… Peu à peu il s’éloigne, l’abandonne aux soucis matériels d’une famille insupportable, se considère maintenant supérieur à elle et, s’il la craint encore trop pour ne pas lui obéir, se sent capable de vivre sans elle.

Quelle connerie l’existence! Voilà où on en était arrivé sans espoir de retour; on vivait l’un à côté de l’autre sans espoir de se rencontrer un jour. Une petite vie médiocre, mesquine, faite de calculs quotidiens dans une absence irrémédiable de ressources suffisantes.

On était la femme de Zabre.

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