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Écrits de Marc Hodges
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20 mai 2006

Un immeuble en pierre meulière

Le 343 est un immeuble en pierre meulière. Vous sonnez.

Des pas s'approchent de la porte. M. Proust est en gilet. Il est maigre, a le visage blême avec des cernes noirs. Sur sa boutonnière gauche est épinglé un camée représentant une jeune fille au fin profil, aux cheveux extrêmement blonds. Il vient à votre rencontre tout en regardant une vieille photographie. Vous savez que sa thèse sur l'invention du réel a provoqué quelques sensations dans les cercles dirigeants lorsqu'il l'a présentée, il y a un an. C'est un homme menacé. D'un mouvement nerveux, il fait tomber la cendre de sa cigarette sur le sol.Vous pensez qu'il est inquiet. Vous ne le voyez pas, mais vous le sentez. Il vous tend la main. Il a de longs cheveux noirs et des lèvres d'un rouge éclatant. Il vous remet un petit paquet plié dans du papier journal fermé par une ficelle. Brusquement, une silhouette jaillit d'une rue à moins de vingt mètres de vous. Une femme, un long fume-cigarettes aux lèvres, pointe négligemment un petit revolver à crosse de nacre dans votre direction. Des coups de feu claquent. Une balle siffle tout près de vous, ricochant sur le mur avant de s'envoler vers le ciel. Le chemin de la sauvagerie est comme une haie d'épines.

Proust rentre sans dire un mot. Le ciel est gris, la température fraîche. Une escouade d'agents de police se précipite vers le bistrot. Quelqu'un, que vous ne voyez pas, que vous ne pouvez localiser, siffle lentement, avec insistance l'air du "Pont de la riviére Kwaï". Vous vous demandez s'il s'agit d'un signal. Vous vous demandez s'il vous concerne, si vous avez été repéré. Vous décidez de ne pas en tenir compte. Une jeune fille de seize ans, trop grande pour son âge, au teint très pâle, aux cheveux extrêmement blonds, au visage ingrat, vous sourit. Ses yeux sourient, tout en elle est joie de vivre. Sa chevelure est splendide et coule sur ses épaules.

De temps à autre il vous arrive de penser que le malheur est pure imagination. De croire que vous pouvez disposer de vos pensées. Il vous arrive de penser que le bonheur est un piège.

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