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Écrits de Marc Hodges
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15 octobre 2015

Chez la baronne du Buisson

J’avoue que j’étais assez fier de moi et, malgré les moqueries radical-socialistes de mon père et l’indifférence de ma mère de plus en plus noyée dans sa dépression, je décidai d’y aller pourtant bien conscient de mon ignorance totale des codes dans cette partie pour nous totalement exotique de la population mendoise. Au lycée, la cravate étant alors obligatoire, je décidai de mettre un nœud papillon qui me semblait plus chic. Mais je n’en possédai pas. Je pris donc celui que mon père portait à son mariage. J’ignorai également si je devais, ou non, confirmer ma venue. J’interrogeai mon ami bouquiniste qui n’en savait rien et, ne put d’ailleurs s’empêcher de me demander « ce que j’allais faire dans cette cambuse à reliques ». Pourtant, aucune de ces réactions ne me découragèrent et le jour dit, je me présenté à l’heure dite, à la porte du vieil hôtel particulier de la rue Notre Dame. Je savais qu’il y avait deux entrées, une porte cochère donnant sur une petite rue prétendue mal famée, une autre dans la rue principale fermée par une porte en bois sculptée qui aurait été belle si elle avait été maintenue en bon état pourtant, c’est celle que je choisis. Il n’y avait pas de sonnette apparente, je frappais donc, timidement d’abord puis n’obtenant aucun résultat, de plus en plus fort jusqu’à ce que le sabotier dont l’atelier se situait au rez-de-chaussée vint me dire qu’il était inutile de frapper ici, qu’il fallait entrer par la porte cochère et aller sonner à la porte du premier étage. J’entrai donc par la porte cochère latérale. Elle ouvrait sur un porche donnant sur une petite cour entourée d’un côté d’arcades sous l’une desquelles était garée une Simca 8 vert pomme. En face de ces arcades s’ouvrait un escalier trop vaste pour la taille de l’immeuble et dont les larges marches s’appuyaient d’un côté sur un mur peint d’un faux marbre vert écaillé et de l’autre sur une rampe de pierre soutenue par des colonnes. Pour atteindre le premier étage, il fallait franchir un premier palier et ce n’est que sur le second que se trouvaient trois portes, une centrale et deux latérales. Entendant des voix derrière celle de gauche, je frappai. Elle s’ouvrit sur une petite jeune fille qui me demanda ce que je voulais. Je lui montrai l’invitation : « Ah, vous vous trompez, il ne faut pas frapper ici, ici c’est la cuisine » et elle me montra la porte centrale ajoutant « frappez fort, ces messieurs-dames sont au salon et discutent. Ils risquent de ne pas vous entendre. Si c’est le cas, revenez ici, j’irai leur annoncer votre arrivée » puis elle referma la porte. J’allai donc à la porte centrale me demandant ce que signifiait « frapper fort », « fort » jusqu’à quel point ? Pourtant je frappai. Ce n’est qu’à mon second essai que j’entendis des pas se diriger vers la porte qui s’ouvrit devant un petit homme chauve vêtu d’une redingote donnant sur le rouge et qui me parut à la fois vieillotte et un peu éliminée. Il se présenta aussitôt : « chevalier de Gabriac, à qui ai-je l’honneur ? » Je lui tendis maladroitement la carte d’invitation ajoutant : « Maurice Roman, j’ai été invité ». Il me regarda avec un léger sourire dont je ne savais s’il était bienveillant ou ironique : « on ne vous attendez pas jeune homme, vous n’avez pas envoyé votre carte pour annoncer votre venue mais, ça ne fait rien, vous êtes quand même le bienvenu, je vais vous introduire auprès de la baronne ». Il me fit passer devant lui dans un vestibule sombre, puis ouvrit une porte et nous entrâmes dans ce qui était le salon : c’était une pièce à plafond haut éclairée par deux fenêtres qui devaient donner sur la rue. Les murs en étaient en assez mauvais état même si quelques tableaux plutôt sombres essayer de le dissimuler. Dans un coin, je remarquai une chaise à porteur aussi défraîchie que le reste de la pièce.

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