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Écrits de Marc Hodges
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16 octobre 2015

la poésie est partout à qui sait la voir

Il sait qu’après tout ce qu’il vient d’apprendre il lui sera difficile de trouver le sommeil, décide de se promener le long du fleuve où défilent des sampans éclairés par une simple lanterne. Décidément, pense-t-il, la poésie est partout à qui sait la voir, ce spectacle d’archaïques sampans glissant lentement entre les deux couches d’eau noire, de la pluie et du fleuve, les faisant apparaître comme flottant dans l’indéfini d’un espace illimité n’est-elle pas symbolique des destinées humaines qui vont lentement, en aveugles, vers des buts dont elles ne soupçonnent rien ? Il marche, rentre dans une petite rue où des marchands de tout et de rien surveillent leurs étalages en bavardant sans cesse dans cette langue chantante dont il ne comprend rien et qui fait pour lui comme une musique de fond. Au centre de la rue, un bar est ouvert, éclairé par des lanternes de papier rouge, de jeunes femmes au bar, vêtues de longues robes de soie vietnamiennes fendues jusqu’au sommet des cuisses ne laissent aucun doute sur le métier qu’elles pratiquent. Il se dit que la fatigue du corps est le moyen le plus naturel pour trouver le sommeil. Il entre, s’assied à une des petites tables faiblement éclairée par sa propre petite lanterne. Le patron du bar vient aussitôt, s’adresse à lui dans un anglais approximatif du genre — vous que boire ? — Whisky, double. — Vous vouloir compagnie ? Aucun des deux n’est dupe, les rôles sont bien établis, entré dans ce bar il ne peut ignorer que des « hôtesses » sont en attente, de même que le patron sait que sa question n’est que de convention. D’ailleurs les quatre jeunes femmes sont maintenant tournées vers lui, visages ornés d’un sourire de commande. Le patron semble attendre une réponse. — Ok, dit Peter, avec plaisir. — Vous choisir… Peter regarde les quatre jeunes femmes, ne veut pas avoir l’air de les examiner comme du bétail, il sourit, elles sourient. Elles lui semblent plutôt interchangeables, assez petites, minces, des cheveux très noirs, rouge à lèvre très rouge, cils maquillés au khôl, leurs longues robes de couleurs différentes brodées de motifs de dragons, pourtant il ne veut pas que le patron du bar lui impose son choix, décide cependant de s’en remettre au hasard, d’inviter la deuxième dans l’ordre alphabétique. Demande : — Comment s’appellent-elles ? Le barman ne semble pas comprendre, Peter insiste : — Leurs noms ? Le patron prononce plusieurs mots qu’il ne comprend pas bien. Peter montre qu’il n’a pas compris, fait répéter ajoutant : — doucement. Le patron détache quatre noms : Cam Tu, Kim Mai, Sen, Anh Tur. Peter répète à sa façon interrogeant du regard son interlocuteur qui acquiesce. Peter réfléchit puis dit : — Cam Tu. Le patron acquiesce d’un signe de tête, fait signe à celle qui est le plus à gauche du bar. Elle se lève, encore plus souriante, respire, s’avance avec la grâce d’une chatte qui vient se frotter à vos jambes, arrivée à la table, elle joint ses deux mains à plat, s’incline. Peter lui fait signe de s’asseoir à côté de lui. Elle demande : Américain ? — Non français. — Très honoré de faire votre connaissance. Bien qu’un peu désuet, son français est correct : — Pourriez-vous me faire l’honneur de me dire votre nom ? — Peter, dit Peter. — Très honoré monsieur Peter, mon nom est Cam Tu. Le patron apporte une bouteille de whisky et deux verres, dépose le tout sur la table.

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