De Carcassonne, réponse de Palancy à Lucienne

Commencer une lettre d'amour ?…

Pourquoi, Lucienne, me parlez-vous de Roberte, je ne connais que vous ? Je viens juste de recevoir votre mot. J'ai toujours attendu ça; je ne peux partir sans vous dire que je vous aime; que les réflexions que je fais diffèrent de celles avant notre rencontre de Carcassonne - pourquoi votre bonté se dément-elle de temps en temps. Si vous m'aimiez autant que je vous aime, vous ne douteriez pas de ma torture, je parle de vous aux murailles de la ville; vous ne pouvez me voir mourir sans être touché. Je sacrifierais tout pour vous, rien ni personne, Lucienne, ne me fera changer d'avis. Les grandes passions s'expriment confusément; l'amour que j'éprouve pour vous m'effraie, revenez me rassurer par votre présence; je crains d'être dominée par une émotion impossible à maîtriser.

Entre vos mains mon âme n'est plus qu'un jouet pourtant j'ai appris à me taire.

Lucienne, j'erre autour de Carcassonne sans ne plus savoir où aller. Craignez-vous que je vous oublie. Sans doute "je vous aime", devrait tenir lieu de tout. La rue de la barbacane est pleine d'amoureux, je souhaiterais infiniment que vous eussiez autant de penchant à m'accorder que ce que je désirerais de vous; il est douloureux d'aimer seul, je vous aime éperdument, ma passion n'est pas un amour insipide ; elle en a toute la fougue, qu'importent nos différents.

Le temps montre son hésitation, le soleil brille juste au-dessus des toits - je me demande ce que les gens peuvent avoir dans le crâne… per vos totz li cors mi dol, mon coeur souffre pour vous, l'homme qui aime peut par moments se surpasser.

Je vous attendrai éternellement porte Narbonnaise; après tout il n'a pas dépendu de moi de ne pas vous aimer.

Palancy.