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Écrits de Marc Hodges
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27 juin 2007

Une histoire d'amour

Wilfrid se dit qu’il allait enfin pouvoir s’occuper sérieusement de la préparation de sa daube : il mit la poële sur le camping-gaz qu’il régla à très petit feu doux, mesura deux cuillerées d’huile d’olive extra vierge puis, quand elle commença à gazouiller, y versa les petits cubes de poitrine de porc qu’il avait préparés. Une nouvelle odeur légèrement acide de graisse fondante prit place au-dessus des autres. Wilfrid respira profondément…

Pourquoi La Beude est-elle morte se demanda-t-il à voix haute ?

Il savait bien qu’il n’aurait pas de réponse mais la question lui était venue comme ça, naturellement.

Wilfrid avait connu La Beude dans les années cinquante alors qu’il était ouvrier pâtissier: elle avait dix-huit ans, lui aussi. Elle était dactylo dans une petite boîte d’assurances. Rien d’original. Il n’y avait pas de raisons, depuis leurs naissances ils étaient voués au manque d’originalité: petite ville, familles des plus modestes, frères ou sœurs normaux, petites études, petits métiers, petites vies à venir ; vie de quartier, repas de familles, cinémas ou bals du samedi soir, fêtes foraines et de village… Une vie normale de gens normaux sans risque réel de dérapage. Ils se connaissaient vaguement depuis toujours habitant le même pâté de maisons modestes dans des rues identiques, meublées de la même façon…

Un jour de printemps, sous les platanes, ils s’étaient regardés davantage que d’habitude et ce qu’ils avaient vu ne leur avait pas déplu: ils avaient décidé d’engager un amour éternel construit par des rendez-vous successifs, de fausses cachotteries, de petites jalousies entretenues, de petits cadeaux, de flirts, d’abord dans la salle de cinéma de la ville, puis dans les bois alentours, derrière les rhododendrons du jardin public… Enfin, toute la panoplie indispensable du rituel amoureux. Vigueur des sens aidant, ça n’avait pas mal marché. Après un délai raisonnable de dix-huit mois (indispensable pour les économies) ils décidèrent ne plus pouvoir vivre l’un sans l’autre. Ce postulat convenait aux familles. Ils s’unirent pour le meilleur: le pire n’était pas au programme…

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