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Écrits de Marc Hodges
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30 septembre 2015

Entre Toulousette et le Mas de Val, 14 h 21

C'est maintenant qu'il est chez lui ! Il voit tous ceux qui ont nourri son enfance de paysage, de ciel et de terre. Il n'arrivera rien. De ci de là, des pierres torturées poussent comme de petits pins malingres. Aux petites forêts de pins que le sentier traverse parfois, il préfère le paysage dévêtu. Il pense à son enfance. Il lève les yeux vers le ciel. Quelques timides pépiements d'oiseaux éclaircissent ça et là le ciel. Tout meurt, tout refleurit, le cycle de l'existence se poursuit éternellement. Le paysage s'effondre dans une douce mollesse. Il estime qu'il a droit à tout. Il pense que c'est le contraire d'un pays à idées fixes. Il a engrangé assez de souvenirs pour que son existence ait un sens. Quelque chose doit se produire…. à chacun de ses pas ses réflexions lamentables s'évaporent. La contemplation du paysage lui est une ascèse. Il se sent tout à fait à l'aise dans le tricot de sa solitude. Un ensemble de rochers calcaires dessine comme un paysage de ruines romantiques. Dans l'air parfois sont des fissures pour l'âme…. Le ciel dévore l'herbe maigre. Il pense que la peur est un privilège. Il aime l'idée d'avoir pour lui seul tant d'espace. Il a conscience que ses yeux cherchent à voir derrière les objets. Il regarde autour de lui. Il crispe les doigts. Il se sent de connivence avec ce paysage tendant au dépouillement absolu, fin et commencement. On finit par ne plus vivre que ce que l'on a en soi. Un paysage n'est rien en lui-même !…. Une grand-mère est soudain là qui le dévore depuis toujours de ses yeux si aimants. C'est maintenant qu'il est chez lui !. Tant de choses remontent en sa mémoire. Il ne laisse rien de lui au-dehors. Sa mélancolie vient de la lucidité du cœur. Le calme est si pur qu'il entend avec beaucoup d'éclat des bruits lointains : branche qui craque, aboiement de chien, clochette de mouton. Il n'est pas le seul à subir. Il a toujours gardé l'habitude de tâter le goût de ses interrogations. Certaines choses lui sont plus nécessaires que d'autres…. L'éternité commence au-delà des apparences. Dans ses voyages, il a trouvé beaucoup d'endroits magnifiques, mais aucun ne lui a donné ce sentiment de plénitude. C'est ainsi ! Il sait trop de choses qui ne comptent pas. L'au-delà reste pour lui une notion abstraite. Aussi loin qu'il peut voir, il n'y a que de la lumière sur les champs déserts. Au bord d'un bois, un mûrier ponctue discrètement l'espace de ses points rouges et noirs. De nombreuses images d'adolescents, d'hommes, de femmes lui viennent puis disparaissent. Il pense que tout ce que propose la civilisation, tout ce qu'elle apporte, rien n'est rien si les hommes ne comprennent pas qu'il est plus émouvant pour chacun d'eux de vivre un jour que de réussir le progrès technologique. Toute accusation avorte ici. Il est tellement vêtu de ville et de murs…. Il pense que tout pourrait encore changer…. Une horloge sans fin sonne en sa tête. Il pense à des définitions aussi exactes que possibles. Le temps passe et s'arrête et passe et l'histoire s'arrête. Il voudrait faire quelque chose. Il pense qu'il ne pourrait quitter tout cela et en même temps s'y ennuie. C'est la parfaite solitude. Il sent dans l'air la présence impalpable du silence. Il converse avec ses êtres intérieurs et avec ceux qu'il aime, les absents et les morts. Il se sent isolé des autres, tout comme eux-mêmes sont isolés entre eux. Son âme exulte de se sentir si proche de son retour. Il aime la forêt, il aime aussi la ville.

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