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Écrits de Marc Hodges
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2 septembre 2015

une défaite de l'esprit

Comme il lui devenait impossible de se concentrer sur sa lecture, qu’il ne savait plus ce qu’il venait de lire quelques minutes auparavant, il se releva, alluma son ordinateur se disant que, s’il se concentrait sur les créations qu’il avait en cours, son esprit oublierait sa vessie, son corps se détendrait et il pourrait à nouveau vider sa vessie naturellement. Il essaya aussi de pratiquer la méditation, mais son corps parlait de plus en plus fort et la pression au bas du ventre l’obligea à essayer à nouveau de pisser. En vain. Et la pression devenait de plus en plus forte il se mit à marcher de long en large dans son appartement, seule position qui le soulageait un peu. Il ne pouvait s’empêcher de se trouver ridicule et de s’accuser de faiblesse. Il s’écoutait trop. Sa douleur ne pouvait pas être à ce point insupportable qu’il ne lui résiste pas. Il prit un cachet d’aspirine, seul remède que tout au long de sa vie, il s’était autorisé et avec parcimonie et qui, d’habitude, le soulageait vite. L’effet fut nul. Au bout d’une heure, la pression augmentant et sentant son ventre enfler et se durcir, obligé de reconnaître sa défaite intellectuelle, il se résigna à appeler SOS médecins. L’opératrice lui dit qu’il y avait deux heures d’attente. Il détestait attendre. La plupart du temps il n’attendait pas, trouvant une autre solution. Il vécut cela comme une nouvelle défaite pourtant, comme il vivait seul, il n’avait pas d’autres solutions. Il attendit parcourant de long en large son appartement, arrêté régulièrement par de violentes crispations douloureuses du bas ventre qui le pliaient en deux. Enfin, à cinq heures quarante trois — toujours soucieux de ne pas trop abdiquer devant la douleur, il s’obligeait à analyser le comportement de ses organes, à mémoriser des faits anodins, à rédiger mentalement des phrases pour ses travaux en cours mais ces placebos ne faisaient que de moins en moins d’effet. Enfin, la sonnette de son appartement retentit. Le médecin entra. Après palpation du ventre, le diagnostic fut immédiat : il fallait aller aux urgences. C’était pour lui une première et comme il vivait seul, le médecin, ayant encaissé ses honoraires, lui appela une ambulance lui disant qu’elle allait arriver. Ce fut une autre demi-heure de marche d’une fenêtre à l’autre, de la télé qu’il avait allumée mais ne regardait pas à la porte, de la porte à un fauteuil d’où, à peine assis, il devait se relever. Puis arriva l’ambulance. Les ambulanciers étaient gentils, trop gentils : ils proposèrent de le descendre sur un fauteuil. Il refusa, il y avait quand même des limites à ce qu’il pouvait accepter et il aurait vécu ce transport comme une déchéance absolue. Il descendit à pied les trois étages. L’ambulance était devant la porte de l’immeuble. Heureusement qu’à cette heure-là personne n’était dans la rue et que les voisins n’étaient pas encore éveillés car il se voyait mal devant, par la suite, leur dire ce qui lui était arrivé.

Le trajet pour l’hôpital le plus proche fut rapide. Les ambulanciers savaient exactement ce qu’il fallait faire et l’amenèrent aux urgences. C’était sa première visite ce qui, malgré sa douleur, éveillait en lui une curiosité certaine car, comme tout le monde, il en avait entendu parler, avait vu des reportages à ce sujet, mais n’en avait pas une expérience personnelle. 

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