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Écrits de Marc Hodges
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1 février 2015

le Poète regrette la neige

10. La nostalgie du Poète

le Poète regrette la neige qui tombait sur son village d’enfance se lamente sur sa blancheur sa qualité sa quantité ce qu’elle était alors elle la neige l’enfance et tout ce qui va avec comme nostalgie goût de Carambar collé au palais de filaments de bois de réglisse coincés dans l’écartement des dents de lait regrette regrette l’enfance ou la neige ou les neiges de l’enfance ne sait pas trop le regrette regrette ça et tout ce qui allait avec le sourire lumineux de sa mère ou sa grand-mère ou d’une de ses tantes la voix grave posée des mâles dominants de la famille la lourdeur des petits matins quand il fallait s’extraire de sous les plumes pour emprunter le chemin de l’école sous la neige avec tous ces flocons qui piquaient les yeux gerçaient lèvres et mains joues rougies de froid et du plaisir brûlant de tout ce froid net sans bavures ni hésitations tout cet effacement des inattendus du monde page offerte à l’écriture de toutes ses rêveries et délires il regrette tout ça par moments le regrette par moments le froid saisissant les cheville dans les ruisseaux de braconnage les parfums-femmes des sous-bois humides comme vulves où il s’enfonçait avec volupté découvrant les odeurs du sexe le regrette comme odeurs d’automne échappées du fumier du temps le regrette et ça le gave le gave ce regret qu’il regrette aussi

11. Les incertitudes du Poète

le soir ne lui arrive jamais jamais ni le jour ni la nuit ou la nuit vit dans l’incertitude absolue des choses pas de raison que demain soit ni même que hier ait été s’attend à tout d’un monde où mouvement et matière s’inventent dans une même incertitude où les espaces s’emboîtent dans d’autres espaces encore s’attend à tout regarde la lumière comme un accident la nuit le ciel les odeurs et les sons comme autant de contingences avec lesquelles il doit faire résiste essaie de résister aux impératifs impérieux du corps défécations mixions vomissements rhumes sanies diverses rien ne lui vient jamais du monde rien rien rien ne sait ne sait ce qui le fait le bouge l’habite le vit ne sait ne veut pas ne peut pas savoir s’attend à tout du monde

12. La mort du Poète

le Poète n’a jamais réfléchi à la mort jamais pu jamais voulu sait pas la laisse venir sans plus envers et contre tout laisse venir lentement comme toutes autres choses inaccessibles laisse faire ne voit ni ce qu’il pourrait en attendre ni ce qu’il pourrait en dire ni en faire ni en penser laisse venir c’est tout un point c’est tout n’a d’ailleurs la perspective d’aucun autre choix aucun vaste trou noir de sa pensée où s’engloutit toute réalité impensable absolu du vide de l’au-delà de l’être sait qu’elle est le constate aux disparitions de ceux qui l’entourent aux larmes aux rituels funéraires au pourrissement des fleurs la décomposition de ses restes de nourritures la moisissure des champignons forestiers ou de ses pots de confiture voit la voit à son poisson rouge surtout le poisson rouge et blanc qui flotte un jour ventre argenté en l’air refuse de se laisser entraîner par la griserie mathématique des multitudes d’espaces qui l’entourent des au-delà en-deçà au-delà au delà d’autres au-delà encore reste là où il se trouve s’efforce à l’immobilité l’apathie de son temps un point c’est tout ne veut pas penser la mort sa mort un mot c’est tout

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