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Écrits de Marc Hodges
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4 janvier 2015

Du sport

J’ai un besoin constant d’activité physique et, bien que j’approche de la soixantaine ce besoin ne cesse de croître, peut-être un réflexe primaire de refus de l’inéluctable vieillissement. Plus jeune, en effet, je n’étais adepte d’aucun sport et je me souviens bien dans mon enfance et mon adolescence avoir détesté à la fois les leçons de sport et la compétition que trop souvent elle impliquait. Non que j’ai été adepte de la paresse physique car j’adorais nager dans la rivière proche de chez mes parents, escalader les parois calcaires qui cernaient ma ville d’enfance, randonner avec mes vieux skis de bois lorsqu’il y avait de la neige, faire du vélo sur les routes et les chemins et, même, plus tard, explorer les bois et les grottes que m’offrait le paysage. Mon enfance était libre, mes parents — négligence ou inconscience — me laissaient une liberté absolue à condition que je respecte quelques règles de base : dire où je voulais aller et avec quel de mes camardes, rentrer avant sept heures du soir l’été et cinq heures l’hiver, ne jamais faire l’école buissonnière. J’ai ainsi élevé mon corps comme, je l’imagine, doit le faire un petit sauvageon. Aussi le sport, du moins ce qui en portait l’étiquette officielle, m’apparaissait plus comme une activité de démonstration sociale que comme une hygiène personnelle et si, bien sûr, de par ma condition sociale, j’ai dû quelque peu lui sacrifier une part de mon temps, je n’ai jamais été passionné par le tennis que je devais pratiquer ni par le golf, ni par aucun sport collectif. Si j’ai été socialement obligé de jouer au foot, je me suis assez vite arrangé pour que personne ne me veuille dans une quelconque équipe. Le sport, pour autant qu’on puisse dans ce cas l’appeler ainsi, n’a pour moi d’intérêt que dans une pratique individuelle et si l’on m’avait dit, si l’on me disait encore, que j’étais sportif, je refuserais cette qualification. Ce que je pratique de plus en plus, ce que j’ai toujours pratiqué est beaucoup plus proche d’une forme d’hygiène corporelle : j’aime que mon corps réponde à mes désirs, j’aime essayer de maîtriser les petites douleurs que la vie entraîne inévitablement.

Si je nage, beaucoup, si je fais de longues courses à vélo ou à pied, si j’adore affronter les montagnes, ce n’est ni pour le goût de l’exploit ni pour bâtir une quelconque image sociale. Les seuls exploits qui m’intéressent sont ceux qui sont à ma mesure : allonger mon temps de nage, faire davantage de kilomètres à vélo, augmenter les distances de mes randonnées car, dans ce cadre, chaque défi gagné me donne la satisfaction de dompter le corps par la volonté. Je suis un orgueilleux solitaire. Ce qu’autrui peut penser de moi m’importe peu, ce qui m’importe c’est ce que je peux penser de moi. La relation première de mon corps et de mon esprit est celle du défi : je ne vis, je ne continuerai à vivre que tant que ce lien, qui impose une discipline constante, restera établi. Je refuse de m’apitoyer sur moi-même, de céder à la fatigue, la paresse, je tente toujours de maîtriser mes douleurs par moi-même car, s’il en était autrement, je pense que la vie ne présenterait pas le moindre intérêt. Nous sommes esprit et corps et c’est dans cette dualité que l’humain doit toujours se construire. Que l’un cède le pas à l’autre me semble entrer dans l’antre de Cerbère.

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