Enfances

Nous aimons aller jouer au bord de l'immense forêt qui entoure le village. Médon commence à apprendre le latin. Bien qu'il soit mon ami, Médon est mon seigneur — nous jouons surtout le dimanche car le prêtre nous interdit de travailler ; pendant que Médon va à la chasse au cerf avec son père, j'aide le mien aux champs. Le prêtre me dit que l'âme de ma soeur, morte avant son baptême restera, pour l'éternité, dans les limbes — Hairveus et moi, Médon, nous avons neuf ans — Hairveus ne sait ni lire ni écrire ; Hairveus rêve d'être un homme libre — Médon me dit quelquefois des psaumes qu'il a appris à l'école du prêtre : " l'Éternel aussi accordera le bonheur, et notre terre donnera ses fruits". Rainbold, le prêtre, nous parle généralement de l'enfer : " des têtes coupées restent vivantes séparées de leurs corps " ou " nombreux sont ceux plongés dans un marécage de merdes "... Pour faire des vœux, nous allons ensemble jeter des pierres dans la source Saint Mauronce — Médon ne vient pas dans notre cabane qu'il trouve trop sale ; le maître de mon père est le roi Éleuthère... Médon commande à tous les enfants du village... Le père de Médon raconte par intermittences des histoires de batailles que nous écoutons attentivement ; je joue aussi aux dés avec mon père. Quand il aura douze ans, Médon prêtera serment devant le comte de fidélité au roi ; nos pères ont tous pouvoirs sur nous ; ma soeur Hirimalda joue à la poupée. C'est Dieu qui a décidé que Théodulfe serait fils de serf et Médon fils de marquis. Médon rapporte trop souvent à Théodulfe les exploits de son père — nos réalités vont en s'éloignant... Je joue aussi aux dés avec mon père. Pour nous faire peur nos parents nous racontent des attaques de Normands — le jeu des échecs est l'art le plus brillant pour un jeune noble — Médon ne doit pas savoir que je vais parfois braconner dans les bois avec mon père. Le jeu des échecs est l'art le plus brillant pour un jeune noble. Le village autour du château est petit, il y a peu d'enfants de notre âge — quand j'étais enfant j'avais comme jouets des oiseaux en terre cuite, mes soeurs des poupées en ivoire... Son père aime regarder Médon se battre avec les autres garçons du village. Avec Médon nous avons le même âge. Bien qu'il soit mon ami, Médon reste mon seigneur et je lui dois obéissance. Beaucoup d'enfants meurent avant d'atteindre notre âge... Pour ses neuf ans le père de Médon lui a offert un cheval. Tant que nous n'avons pas atteint dix ans nous n'intéressons personne. Médon a deux soeurs, Aclinde et Johanna ; j'en ai deux aussi Adélaïde et Liutgarde... Nous aimons aller jouer au bord de l'étendue forêt qui entoure le village. J'aimerais avoir d’aussi beaux habits que Médon ; je ne connais le monde que par ce que dit notre prêtre. Pour nous faire peur nos parents nous racontent des attaques de barbares — quand il aura dix ans, Médon sera envoyé comme écuyer à la cour de l'empereur ; je n'ai jamais le droit d'aller dans le château de Médon — nous jouons à capturer des esclaves Saxons : Mauronte ou Arnold, d'autres enfants du village. Quand ils le peuvent les moines achètent de très jeunes esclaves pour en faire des moinillons ; j'envie le château en pierre de Médon ; mes parents et moi, nous vivons dans une hutte en bois — l'univers est pour nous comble de mystères. Quand il aura dix ans, Médon sera envoyé comme écuyer à la cour du souverain ; moi Chunibert je n'ai jamais eu de jouet, je me suis sans arrêt amusé avec des cailloux. Nos réels vont en s'éloignant. Pour nous faire peur nos parents nous racontent des attaques de Normands. Médon est le fils de notre maître — nous jouons aussi à la marelle. J'aimerais avoir d’aussi beaux habits que Médon — tant que nous n'avons pas atteint dix ans nous n'intéressons personne — quand je mène les porcs à la lisière de la forêt, ma mère pour me protéger me fait porter un collier de dents de loups. Avec ses camarades Médon joue aux devinettes — dans nos jeux, je suis le guerrier du monarque Médon. Le père de Médon raconte par intervalles des histoires de mêlées que nous écoutons attentivement ; Médon et Chunibert jouent à reproduire les exploits du père de Médon.