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Écrits de Marc Hodges
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7 juillet 2014

Il n’aurait su dire s'il avait été heureux

X-Sender: jbalpe@mail.away.fr
Date: Sat, 7 Jul 2001 15:14:08 +0200
To: Balpe Jean-Pierre <jbalpe@away.fr>
From: Jean-Pierre BALPE <jbalpe@away.fr>
Subject: Mail-roman "Rien n'est sans dire", courrier N° 88
 
« X-Sender: levordasky@mail0.uquebec.ca
Date: Thu, 5 July 2001 13:03:33 -0400
To: Jean-Pierre BALPE <jbalpe@away.fr>
From: Pierre Levordasky <levordasky@mail0.uquebec.ca>
Subject: Re: Mail-roman "Rien n'est sans dire", courrier N° 86
 
J’aime bien toujours ton mail-roman dont je suis un lecteur fidèle. Un petit reproche cependant, je trouve tes personnages trop squelettiques, tu ne nous parles pas assez d’eux, de ce qu’ils sont et font…
Amitiés »
 
Confondant cette autobiographie avec un roman naturaliste, vous ne cessez, lecteurs, comme en témoigne le courrier ci-dessus, de me reprocher l’absence de tous « portraits », en voici un choisi parmi les nombreux personnages que j’ai évoqués… J’espère qu’il vous satisfera et que, convaincus enfin de ma capacité à les construire, vous ne me demanderez plus d’y revenir…
 

Maurice Seigneuret, le père de Sylvère, n'avait pas besoin de beaucoup de chaleur humaine, ses brefs passages quotidiens dans ses quelques bistrots habituels de Nonville ou de Nemours y pourvoyaient suffisamment, aussi n’en dispensait-il pas beaucoup lui-même : les aventures politiques de son père l'avaient suffisamment familiarisé avec la présence de l’incertitude et du néant des choses. Estimant qu'il n'y avait pas de véritable liberté : il s'efforçait souvent de ne penser à rien, tout se faisait sans lui… Il ne parvenait pas à considérer que les événements du monde présentassent le moindre intérêt aussi avait-il décidé de ne plus vivre que pour lui-même, peut-être était-il devenu sage ? Misanthrope depuis toujours, il traversait des moments de pessimisme absolu, se laissait souvent aller à donner des leçons de morale. Il n’aurait su dire s'il avait été heureux : s'étant persuadé qu'il était très heureux, il l'était mais il ne savait pas tout à fait s'il s'aimait car il ne prit conscience de l'importance des choses que lorsqu'elles commencèrent à lui faire défaut : Maurice Seigneuret était ravagé par la peur de la vieillesse. Il avait toujours une forte attirance pour les corps jeunes et sains dans lesquels il oubliait la nostalgie de sa propre jeunesse... Toute sa vie il avait fait bon ménage avec son corps, il connaissait quelle image de lui il voulait transmettre aux autres car, d’après lui, toute la réalité pouvait être perçue à partir du lieu de ses désirs : il avait une attirance-rejet pour la mort. Dans sa glorification du corps, Seigneuret ne cherchait en fait qu'à refouler sa déception du sexe. Maurice Seigneuret savait qu'il n'avait pas le choix, qu'il fallait vivre et, pour cela, il s’efforçait de maintenir son corps dans les limites de ce qu’il considérait comme le minimum d’une apparence convenable. Parce qu’elle représentait pour lui une violence insoutenable, il ne comprenait pas qu'on puisse vivre une seule journée sans penser à la mort.
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