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Écrits de Marc Hodges
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8 mars 2014

notre seule référence commune

Je ne vous ai que très peu parlé de Zita ; pourtant elle est au centre de ce récit. Pendant des années, elle n’a été pour moi qu’un nom et un idéal, celui que, dans ses propos, décrivait Stanislas car je ne l’ai vraiment rencontrée qu’en 1987 après son évasion roumaine et je dois dire qu’elle était bien à la hauteur de son image. Je pensais que nous serions amener à nous revoir souvent mais je dois dire qu’il n’en a rien été : Stanislas avait désormais sa vie, moi la mienne, ses voyages, moi les miens et nous ne nous fréquentions plus que de loin en loin. Il est vrai qu’elle n’est restée à Paris que deux ans, mais si nous avions dû nous cotoyer, c’était quand même assez facile. En fait, à cause de moi, à cause d’elle, de Stanislas ou de la vie, nous n’avons eu que trois vraies occasions d’échanges : une fois lors d’un repas chez moi alors que Stanislas était en voyage, une autre par le hasard d’une rencontre boulevard Saint-Germain, une troisième chez des amis diplomates, les Rudunculus… Or, la seule fois où j’ai vraiment discuté avec elle, ce fut au début de cette velouteuse soirée de printemps où, sortant d’une rencontre protocolaire au Quai d’Orsay et descendant à pied le boulevard Saint Germain, par hasard, je suis tombé sur elle. Elle me dit que Stanislas était en voyage quelque part au Moyen Orient, qu’elle s’ennuyait un peu et avait décidé de faire une promenade : la sentant vulnérable à la mélancolie, je lui proposai un verre à la terrasse des Deux Magots, elle accepta… De quoi pouvions-nous dialoguer d’autre que de Stanislas, notre seule référence commune ? Elle semblait en confiance et avoir envie de parler. En fait d’échanges, je n’ai fait presque que l’écouter. Elle semblait à la fois amoureuse et triste de l’être, parlait de Stanislas comme d’un rêve, un être idéalisé difficile à confronter à la réalité : « Je l’aime tant, disait-elle, que je ne supporte pas le moindre de ses défauts et que j’exige qu’il soit, tout au long de ses jours, d’une perfection absolue… Je ne souffre pas, par exemple, l’idée qu’il puisse avoir le moindre problème de santé : un simple rhume me semble une catastrophe qui met en évidence le fait que, lui aussi, est susceptible de déchéance, qu’il peut être malade comme n’importe qui mais je n’accepte pas qu’il soit n’importe qui car je le veux unique et supérieur… Ne parlons pas de ses mensonges ou de ses omissions : je ne l’aime que limpide parce que cette limpidité est la seule preuve de son inaccessibilité aux faiblesses ordinaires du monde… Or je sais avec certitude qu’il ne me dit pas tout, que toute une part de ses activités m’échappe non parce qu’il les mène en dehors de moi — ce que je saurais accepter — mais parce qu’il ne veut ou ne peut m’en parler… Le mensonge par omission est peut-être le pire qui témoigne d’une fêlure dans l’accord de deux pensées : je dois vouloir lui dire tout comme lui-même doit vouloir le faire ou alors, à quoi bon ?… » Par nature en retrait, je me sentais assez mal à l’aise devant ses manifestations de ce que je considérais comme des sentiments trop exaltés : je la laissai parler, n’argumentai que faiblement… Elle dut le sentir, se tut tout d’un coup, regarda sa montre : « Je dois rentrer, dit-elle » et, sans plus de façons elle me laissa là. 
Les jours avancent, vos courriers se ressemblent dans leurs contradictions : nous sommes-nous mal compris ?… Cette correspondance à laquelle je me suis imprudemment engagé m'épuise…
 
« Date: 22 Jun 2001 06:57:59 +0100
X-Sent: 22 June 2001 05:57:59 GMT
From: meierzfrigo@webhelp.fr
Cc: jbalpe@away.fr, jbalpe@away.fr
Subject: Obj.: Mail-roman "Rien n'est sans dire", courrier N° 37
X-Sent-From: mierzfrigo@webhelp.fr
 
cher Jean Pierre Balpe
je vous demande de ne plus m'envoyer de roman car en effet je ne vais pas pouvoir donner suite à votre livre. Je suis désolé, mais je n'y comprends rien et quand je fais l'effort de vous écrire, j’ai le sentiment d'être ignoré. Alors pourquoi mettre de l'énergie là dedans et inventer des histoires comme quoi Stanislas est une femme, ou le père Noël, ou un espion russe, ou l'amant de ma voisine ou le directeur d'une fabrique de chaussures ou un prince arabe...vous en avez rien à faire.
Je suis désolé que çà se termine comme ça. Je vous souhaite bonne continuation et bien du courage parce que je sais pas bien où vous allez. Moi j'aurai bien aimé participer à une intrigue et avec une belle histoire d'amour ou il est partagé entre deux femmes et doit trahir son pays pour en sauver une qui est resté en prison en Roumanie et donc il trafique pour trouver des sous pour acheter ses geôliers etc... Je lirai Libé quand çà sera fini
Salut.
Gilbert Mizpatrick. »

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