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Écrits de Marc Hodges
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25 février 2012

Le choix des Maîtres

Venant due visage virtuel qui s’est formé sur l’écran, une voix artificielle mais profonde, chaude, s’exprime.

- Parce que nous ne sommes qu’un, notre prière est énergie. Notre puissance est divine. Nous Pensée, Nous Lumière, Nous Cosmos… Nous Dieu, sommes force et sagesse nécessaires. En cette époque d’inachèvement, parce que nos frères ne sont pas encore assez nombreux pour que leurs prières émettent sans fin l’énergie spirituelle nécessaire à l’Union Parfaite, notre tâche terrestre est de désigner le Grand Maître qui, accroissant le nombre de nos adeptes, combattant fermement nos ennemis, saura nous faire atteindre ce but, puis, à cette fin, de l’aider de toute l’énergie de notre intellect !

De l’abstraction lumineuse du visage — comme si elles en étaient une des réalisations possibles — les faces des quatre Maîtres émergent ensemble. Chacune s’installe autour de la figure centrale, la regarde. Celle-ci poursuit.

- La fusion énergétique de Denys l’Aéropagite, notre troisième Grand Maître, étant désormais accomplie, il convient que l’un d’entre vous le relaie dans cette lourde tâche. Comme vous le savez tous, suivant nos règles, vous possédez chacun un des éléments du puzzle qui permettra de dire quel est le successeur que, dans sa clairvoyance, il s’est choisi. Il est temps maintenant, de procéder au rite.

En arrière-plan des visages, une figure géométrique apparaît. Elle représente quelque chose comme un bijou, une broche d’apparence ancienne dont les baguettes qui servent de cadre, serties de quelque chose comme des diamants, évoquent un décor “art déco”. Le cœur constitué d’un semis de fleurs sur fond de feuillage imite l’émail bleu. Les fleurs elles-mêmes pourraient être autant de pierres précieuses : rubis, émeraudes, améthystes peut-être… L’ensemble, complexe, est d’une grande élégance.

Siger de Brabant se lève, se dirige vers un bureau sur lequel il prend un coffret qu’il ouvre. Dans ce coffret un bijou identique à celui qui sur l’écran sert de fond aux cinq visages. Le Maître le prend dans sa main droite, le présente au projecteur à matrice active de son bureau. Le bijou semble aussitôt s’inscrire dans un coin puis se déplacer lentement pour venir se superposer à la figure projetée tandis que, au-dessous de son visage s’inscrit son nom : Siger de Brabant.

Presque en même temps, trois autres bijoux apparaissent, accomplissent le même rituel. Lorsque les quatre noms sont inscrits, les cinq visages maintenant au second plan servent de fond à l’image lumineuse du bijou qui se met à tourner lentement sur lui-même.

- Nous allons connaître notre nouveau Grand Maître, dit la voix. Seul celui qui aura communiqué à son signe l’énergie nécessaire en est digne !

L’image du bijou tourne de plus en plus vite, jusqu’à ce que, dans sa vitesse de la rotation, les couleurs se fondent dans une boule de lumière couvrant le visage central. Soudain tout s’arrête, le temps semble immobile et, du fond de la boule lumineuse s’extraie un visage, d’abord abstrait, identique à celui constitué précédemment, mais suivant un chemin inverse, du général vers le particulier comme si, constitué de milliers de peaux transparentes, il les perdait l’une après l’autre sans parvenir, un seul instant, à se stabiliser. Si, par moments, l’œil reconnaît tel ou tel, cette reconnaissance n’est qu’un leurre : très vite les traits du visage sont autres… Ainsi passent Siger de Brabant, Jean de Jandun, Boèce de Dacie. Quand le visage enfin se stabilise, c’est le portait de Taddeo da Parma qu’il offre. En même temps, au centre du bijou, s’inscrivent deux lettres d’or entrelacées : S et P. Il y a un temps de silence…

De son hôtel de Sion, Taddeo da Parma prend la parole :

- Ma joie est très immense d’être notre quatrième Grand Maître. Je n’ai nulle inquiétude : si j’ai été désigné, c’est que vos énergies convergent pour me donner la foi nécessaire. Pour la plus grande gloire de Dieu, nous travaillons ensemble… Maintenant, selon nos règles, je vais désigner celui qui doit me succéder. Comme chacun d’entre vous, pour être prêt à toute éventualité, pour que notre église poursuive sa voie avec constance, je réfléchis sans cesse à cette succession, aussi suis-je en mesure de l’annoncer. Celui qui va me succéder est jeune, mais a toujours été des nôtres ; élevé dans notre religion, comme peu de nos membres, il en possède les arcanes. Notre quatrième Maître sera le fils spirituel de Denys l’Aéropagite… Si aucun de vous ne s’y oppose, je lui annoncerai notre décision cette nuit-même. Demain, il sera en mesure de vous dire le nom de Maître qu’il se sera choisi.

Le visage de Jean de Jandun parle :

- Je ne m’y oppose pas, au contraire, j’accueille avec joie ce nouveau Maître parmi nous.

Boèce de Dacie et Siger de Brabant acquiescent également. Alors, le visage de Taddeo Da Parma, comme une pierre précieuse s’enchâsse au cœur du S et du P entrelacés du bijou tandis que ceux des trois autres Maîtres s’incrustent à trois des angles. Lorsque ceci est terminé, dans la pierre du quatrième angle, se grave celui, plus jeune, de David Peirse.

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