Liberté et dépendance
Je viens de lire un article sur l’oxytocine dans un vieux numéro de Libération;
cette lecture me perturbe: nos sentiments, nos sensations, notre volonté ne dépendraient
que de molécules chimiques… La volonté, la sensation de liberté ne seraient que des leurres. On diffuse une odeur de croissant chaud
et je suis sûr d’avoir faim, une odeur de cuir dans une voiture pourrie et je la trouve
magnifique ?
Je le savais déjà. Bien sûr. Comme tout
le monde. Je savais que l’amour du chocolat ou du tabac était une forme de dépendance. Mais à ce point !
Une petite pulvérisation nasale et nous sommes à la merci de n’importe qui. Stupéfiant. C’est le cas de
le dire.
L’impression d’être suivi, surveillé, d’avoir toute ma vie été sous contrôle, est-elle de même nature? J’en ai parlé à Françoise hier au soir: «Arrête de délirer! Pourquoi voudrais-tu être suivi?» Je ne le veux pas, j'ignore le "pourquoi" je le voudrais,
mais j’ai eu la nette impression que je l’étais. Depuis ce
sentiment me poursuit. Comme lorsque l’on croit revivre point à point un
moment déjà vécu. Comme si le cerveau soudain se mettait en roue libre.
Pourquoi Jean-Pierre Balpe n’arrête-t-il pas d’écrire sur
moi, de mêler des informations et des affabulations au point où je doute
parfois moi-même de ce que je crois connaître de ma vie. Les souvenirs sont-ils
des inventions de l’esprit qui tente d’échapper à la trivialité réelle de l’existence ?