Fin du discours d'Yvré
Désignant sa montre-bracelet ornée d’un
pentacle, Yvré poursuit : — En fait je suis persuadé qu’à l’heure qu’il
est tout Huelgoat parle de cette soirée et s’indigne que l’on ait chanté,
dansé, ri, applaudi dans une église… sauf peut-être les quelques catho-intellos
qui seraient heureux d’offrir une alternative à l’attirance de certaines
doctrines matérialistes (la baronne ou le bedeau), la plupart des chrétiens de
la commune doivent estimer que leur croyance est en danger, cernée par des
hellfest. Or, ces croyances, ils les croyaient solides, immuables, ils
construisaient leurs vies sur cette solidité. Maintenant, le monde autour d’eux
se fissure, menace de s’effondrer et ce d’autant que les autorités paraissent
inactives, ils soupçonnent que s’ils ne veulent pas se laisser détruire, il
leur faut prendre leurs affaires en main: ils sont ainsi aussi dangereux
que des sangliers qui sont acculés à une falaise par une battue, ils n’ont plus
rien à perdre. Que quelqu’un donne l’exemple et ils se mettront tous derrière
lui, prêts à tout pour conserver la tranquillité de leurs anciennes
convictions. Voilà ce que c’est que le politique… Demain, le garde-champêtre
fera un discours public solennel. Vous verrez le résultat ! Je ne donne
pas cher du MRA ni de ses membres… — Bien vu, bien joué, reconnaissent X… et
Zabre. — J’espère que vous assisterez à cette allocution, ajoute Yvré qui
retrouve un ton presque normal, moins exalté, excité, il faut que nous nous
serrions les coudes… Je vous ferai retenir deux places à la tribune. —
Volontiers, acquièsce Zabre.
La réponse de X… se fait un peu
attendre, il semble hésiter, Zabre et Yvré le regardent, interrogateurs. X…
semble un peu gêné, un peu à contrecœur cependant, il finit aussi par accepter.