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Écrits de Marc Hodges
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7 juin 2010

De la description

Dans mes dernières notes, je me suis un peu oublié (ou plutôt laissé aller…), je me suis en effet éloigné de ce qui était mon but principal dans ce blog : parler de Jean-Pierre Balpe. Il est vrai que parler d’un autre, surtout d’un autre que l’on n’aime pas est plutôt fastidieux. Aussi, au grand désarroi du rare lecteur qui doit ne plus rien y comprendre, je me suis mis à parler de moi. Est-ce un début de processus d’identification ? A vous de juger…

Pour revenir à mon projet, je vais ici, reprendre une note que Balpe m’avait envoyé alors que nous étions jeunes et encore amis. Pleins d’illusions, croyant encore en l’importance de la littérature dont nous n’étions pas loin de penser qu’elle jouait un rôle central dans l’évolution intellectuelle de l’humanité, nous échangions notes et réflexions. Je recopie ici une des notes qu’il m’avait envoyée au verso d’un de ces papiers collés qu’il affectionnait de produire à l’époque :

«J’ai un peu réfléchi sur la description. Sur sa nécessité, sur le fait que les écrivains qui se considèrent comme des écrivains l’utilisent sans cesse alors que ceux qui sont considérés comme mineurs en usent peu. La description serait alors l’accomplissement de la littérature : mettre en mots un — ou des — objets du monde… Qu’est-ce que cela révèle ? La littérature a peur de l’action qui n’est rien d’autre qu’une algorithmisation du flux temporel. Elle a besoin d’arrêts, de pauses, de tergiversation. Elle doit freiner l’esprit du lecteur pour qu’il ne la fuit pas vers la réalité. La description est généralement inutile. Contrairement à l’action sans laquelle il n’y a pas de récit, la description est un surplus. Or la littérature, parce que profondément inutile, ne peut être que dans ce surplus, dans ces mots jetables, dans cet effort pour l’inutile. Écrire c’est suspendre le mouvement du monde. La poésie a bien compris cela qui fuit toute possibilité d’algorithme et « parle pour ne rien dire ». La description est toujours artificielle car, par nature, incomplète. Le monde est inépuisable. Les objets du monde sont, en eux-mêmes inépuisables. Dans la description, la littérature trouve cet élan vers l’infini et l’éternel qui seul la justifie. L’auteur est parce qu’il décrit. A cela pas de limites…»

Voilà… Il y a ainsi plusieurs pages que je n’ai pas le courage de taper mais je crois que ce début, dans sa prétention, dans ses affirmations à l’emporte-pièce, est bien prémonitoire de l’auteur prétentieux, ennuyeux, que Balpe, suivant en cela sa propre trajectoire, a fini par devenir.

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