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Écrits de Marc Hodges
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22 avril 2010

Haine d'écrire

Ça commence mal…Ça avance mal, ça souffre, doucement, à petits cris retenus mais ça souffre… Depuis toujours, haine de l’écriture. Eau tiédasse de la phrase avec adoucisseur incorporé. Phrase apprise, longue habitude de formation universitaire. Putain de rythme accroché au corps comme tique ou chancre. Ça doit couler sans heurts avec alexandrin clandestin — la môme avait la jupe au ras de la moumoune — épars, rythme toujours en tête jouant cache-cache, consistance de pus bien gras vert souple phrase phrase autosatisfaite dans sa masturbation grammaticale, sanies verbales encombrant les étagères de bibliothèques, excrément n’attendant que de se déverser dans des oreilles anesthésiées par la marquise image se pavanant dans le petit tilbury bien suspendu de la phrase. Phrase qui s’écoute qui s’écoute s’écoute devenir phrase se prend à son propre jeu bouffant tout autre approche possible se regardant s’écoutant se balançant pavane se pavanant d’une langue défunte. Toute ma vie. Toute ma vie —verbe comme fléau équilibrant la balance des mots — toute une vie à vouloir se défaire de cette merde de cancer trouant le cerveau cru éradiqué repoussant aussitôt jetant ses métastases dans les profondeurs du texte. Désaveu, impuissance, retour du même sous l’avatar des différents, mots se choisissant eux-mêmes de leur complaisante joliesse académique. Tentation de la vulgarité, du cri — merde à la phrase, merde au texte, fuck it…— révolte adolescente et rien à voir, en dessous ça persiste coule sous la surface s’impose en résurgences plus ou moins attendues avec l’admiration béate des foules devant le bien écrit. Marre du bien écrit, du beau Texte ou teXte ou tout autre fiente encore, de ces pseudos extases pseudo mystiques pour illuminations bien gardées entre soi et petits cénacles suffisants se suffisant de cet entre soi. Supprimer l’enflure de l’être, se supprimer, retrancher, anéantir, détruire, éradiquer, briser… marée des synonymes, tentation du synonyme, tentation du même-différent. Casser ça. Casser les automatismes, casser l’automatisme par l’automate. Texte devenu autonome sans culture, passé, mémoire, tentation, contexte, institutions. Texte-texte sans référence tournant sans fin pour lui-même sur lui-même sans peur ni complexe donné brut comme matière à prendre laisser lire ne pas lire afficher diffuser texte pléthore envahissant tous les espaces possibles sans autre intention que celle de cette invasion… seule façon de reprendre à zéro, s’oublier dans le vide du texte, la programmation abstraite de la machine à mémoire vide de mémoire. Faire enfin du texte-n’importe-quoi-n’importe-comment jetable pour société sans mémoire ni lois ni morale ni phrases-miroir où se contempler vivre dans cette pose d’écrivain écrivant s’écrivant devant des écrivains s’écrivant se regardant écrire s’écrire s’écrivant qu’ils écrivent et que c’est bien beau bien bon bien admirable bien prodigieux étonnant merveilleux merveilleusement merdique. Je n’ai jamais su écrire, je ne veux pas avoir su écrire, ne sachant pas comment enfin mal écrire, je ne veux plus écrire…

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