Du Bellay au Vietnam
Un jour, sur l’étal d’une
de ces librairies-échoppes, étalage débordant de livres d’occasion aux
couvertures tachées, aux pages souvent déchirées, parfois manquantes, il
découvre un recueil à la couverture d’un papier qui avait dû un temps être
jaune mais qui, pour lors, hésitait entre le jaune délavé et le marron avancé.
Un recueil assez mince d’un certain Tran Van Quihn, intitulé « C’était
alors… » et dont l’exergue est ce sonnet décasyllabique de Joachim Du
Bellay :
C'était
alors que le présent des dieux
Plus
doucement s'écoule aux yeux de l'homme,
Faisant
noyer dedans l'oubli du somme
Tout le
souci du jour laborieux;
Quand un
démon apparut à mes yeux
Dessus le
bord du grand fleuve de Rome,
Qui,
m'appelant du nom dont je me nomme,
Me commanda
regarder vers les cieux
Puis s'écria : Vois, dit-il, et contemple
Tout ce
qui est compris sous ce grand temple,
Vois comme
tout n'est rien que vanité.
Lors,
connaissant la mondaine inconstance
Puisque
Dieu seul au temps fait résistance,
N'espère
rien qu'en la divinité.
Peter fut assez intrigué pour, oubliant un temps le
lieu où il se trouve, se plonger dans sa lecture. Il n’a pas alors remarqué qu’un
petit homme, d’allure très modeste mais vêtu proprement l’observe depuis le
banc où il s’est assis à l’ombre au milieu d’un groupe de femmes. Au bout d’un
moment, Peter Peterson demande au vendeur le prix de l’ouvrage et, comme
celui-ci est dérisoire, l’achète et s’en va poursuivre ses errances dans la
ville de Hué. Le petit homme se lève alors et, sans que Peter s’en aperçoive,
commence à le suivre.