Rencontres suspectes
La pièce où ils pénètrent
est mal éclairée, surchauffée. Dans la lumière blafarde, au contre-jour d’une
fenêtre, une petite silhouette enroulée dans un plaid, recroquevillée dans un
fauteuil:
- Qu’est-ce que vous
voulez ?”
La voix est
douloureuse ; l’élocution difficile.
- Rien de grave, monsieur
Peirse, juste un renseignement… Nous avons besoin de savoir si vous connaissez
un certain Hamid Kharamidov et à qui il aurait pu téléphoner ici les 16 et 17 décembre ?
- Comment voulez-vous que
je sache. Je m’occupe pas de ça. Demandez à Pat !
- Qui est Pat ?
- Celle qui vous a fait
entrer. Attendez !
Il appuie sur un bouton.
La jeune femme ouvre la porte.
- Oui ?
Buchanan répète sa
question :
- Il y a cinq
pensionnaires ici. Comment voulez-vous que je sache ?
- Vous ne notez pas les
appels ?
- Pourquoi ? Y a que
des honnêtes gens dans cette pension !
Karine et Buchanan se
regardent avec lassitude. Il va leur falloir interroger tous les locataires.
- Combien de personnes
vivent ici, demande Karine ?
- Ben, Monsieur Peirse père,
Dan, David Peirse, son fils, monsieur Benoît, monsieur Braffort, monsieur
Jonak, monsieur Maximoff et monsieur Sanlucar.
- Pas de femme ?
- Si, moi…
j’oubliais !
- Est-ce qu’ils sont là ?
- Je sais pas.
- Pourriez-vous vérifier,
demander à ceux qui sont présents de nous rejoindre quelques minutes ?
- Bien !
La jeune femme sort.
Buchanan et Karine se regardent, machinalement ils examinent la pièce. Rien que
de très banal. Une maison comme il y en a tant, bien entretenue, propre,
confortable, chaude. Buchanan s’étonne de voir qu’aucun projecteur d’écran ne dépasse
du plafond… Deux des quatre murs sont couverts de tableaux. Le troisième est
creusé de grandes fenêtres voilées ; le quatrième occupé par une bibliothèque
surchargée de livres. Aucune place pour des projections…
- Vous n’avez pas la télévision
dans cette pièce, monsieur Peirse ?
- J’y vois presque plus,
répond la voix souffreteuse.
Un jeune homme d’une
vingtaine d’années, blond, presque blanc, cheveux si courts que son crâne
semble rasé, entre dans la pièce. Il se présente :
- David Peirse!
- Mon fils, dit le vieil
homme.
- Excusez-nous de vous déranger.
Nous avons besoin de quelques renseignements.
- C’est rien, mon travail
peut attendre.
Quatre autres jeunes
hommes, suivis de Pat, arrivent à leur tour, et se présentent immédiatement :
- Jean Benoît.
- Claude Braffort.
- Ivan Maximoff.
- Andrés Sanlucar.
- Monsieur Jonak n’est
pas là, ajoute la jeune Pat, je pense qu’il est allé en ville !
- Bien, dit Buchanan,
nous n’aurons peut-être pas besoin de lui.
Il répète sa question.
Les jeunes gens se regardent mais aucun ne répond.
- Personne ne connaît
monsieur Kharamidov ? Aucun d’entre vous n’a reçu de coup de téléphone de
lui ?
Les occupants de la maison
font divers signes de dénégation.
- Bon… Ce doit être
monsieur Jonak… Savez-vous où nous pouvons le joindre ?
- Aucune idée, dit le
fils Peirse.
- Aucun d’entre vous ne
le sait, insiste Karine ?
Le silence est éloquent.
- Lorsqu’il reviendra,
pourriez-vous lui demander de nous contacter à ce numéro ?
- Sans problème !
- Excusez-nous de vous
avoir dérangés.
- Pas de quoi, nous
serions heureux de pouvoir aider la police, répond David Peirse en souriant.
Karine et Buchanan
sortent.
- Que de temps perdu,
soupire Buchanan.
- Avec cette météo, c’est
pas marrant, dit Karine ouvrant la porte de la voiture.
- Le métier, rétorque
Buchanan fataliste…