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Écrits de Marc Hodges
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21 novembre 2008

Vers la falaise des vautours, 12 h 28

Bréauté regarde le décor, un nuage d'images floues tourbillonne dans sa tête, il se promet de ne pas être dupe de toute cette beauté, de la force apaisante des lignes, s'oblige à penser à la mort que cela représente aussi, mais, malgré lui, une tranquille plénitude le gagne. Le silence devient de plus en plus profond, il y a en lui un désir d'amour qui parle le langage de l'amour. L'éternité semble amoureuse des travaux du temps. Il est repris par ses rêves, pense avoir trouvé ici l'harmonie qu'il recherche. Forêts et rochers se taisent, la rigueur est  la seule morale: Bréauté aime l'idée d'avoir pour lui seul tant d'espace, aime tout ce qui a le regard clair et parle franchement. A quoi bon se souvenir et désirer ? Peu à peu, les rêves de son enfance et de sa jeunesse finissent par le dominer. Un vieux chien noir-blanc le suit comme une ombre, seul son halètement rythme le temps.

Il devrait pourtant exister autour de lui une trace de son passé qui lui serait accessible !… Le silence devient de plus en plus profond. Chacun ici se sent important et unique au risque d'en mourir. Bréauté ramasse une petite pierre polie qu'il ferme dans sa main comme un talisman contre la peur. Il sait qu'il affectionne ces paysages vides où il ne se trouve que face à lui-même. Il n'ignore pas: "Les choses viennent, on ne peut pas les empêcher…" L'air a la transparence irréelle d'un ruisseau d'altitude, l'atmosphère est aux rêves, tout parle mais plus personne ne sait comprendre. Bréauté est entouré d'ombres, n'est jamais au-dedans, ni tout à fait en dehors. Le poète doit être un professeur d'espérance. Le coassement d'un corbeau trahit l'épaisseur du bonheur. Le ciel est absolument pur. Il y a quelque chose qui continue de tournoyer quelque part au-dessus de lui, rien qu'un étonnement, un sentiment de nulle appartenance, une solitude pénétrante, une question lancinante qui insiste: "Qui suis-je?" Il jette des pierres pour le chien qui le suit et ne cesse de les lui rapporter, essaie de ramener à la surface de sa mémoire une journée, un matin, une heure… La verdure seule apaise. La route va sûrement quelque part; tout au moins il la voit s'en aller pendant quelques temps mais cela ne lui importe guère…

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