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Écrits de Marc Hodges
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7 août 2006

Une marche difficile

Ganançay rebroussa chemin. La descente sur Labo n'aurait pas dû être trop difficile: ce fut un cauchemar.

Tout au long du sentier, la montagne s'était écroulée ouvrant dans les pentes d'énormes cicatrices d'argile rouge qu'il lui fallut traverser, s'aidant de branches rompues, risquant, à chaque pas, de glisser sur la terre liquéfiée par des pluies incessantes. S'agrippant aux quelques racines qui dépassaient, s'accrochant aux restes de troncs encore en place, il passait difficilement craignant toujours de tomber, d'être emporté par une pente raide, devenue instable, vers ce gouffre invisible d'un torrent qu'il entendait mugir sous lui. Un chiffre, n'importe lequel rassure, il borne, étrangle l'infini mais Ganançay ignorait combien de kilomètres encore le séparaient de Labo. Il avait peur, il avait faim, il se sentait perdu dans cette jungle vide d'hommes où, croyant partir pour une promenade facile de quelques kilomètres, il s'était aventuré seul. A chaque pas tout devenait pire, à chaque nouveau glissement de terrain, petit Poucet imprévoyant, il avait la hantise de ne pouvoir retrouver le fil interrompu de ce sentier, seul espoir de revenir en arrière.

Et la terre tremblait toujours. Lorsqu'il pensait en avoir fini, que le séisme était enfin calmé, le sol bougeait à nouveau, provoquant d'autres éboulements, détachant de nouveaux rochers fragilisés par les chocs précédents, ajoutant à la terre éventrée des montagnes de terre. Mal chaussés, ses pieds étaient meurtris par la marche sur les cailloux; il avait mal partout; ses vêtements, bons à tordre, collaient à sa peau. Il jugea inutile de trop se charger, se débarrassa d'une partie de ce que contenait son sac à dos, ne gardant que le strict nécessaire: un slip sec, une paire de chaussette et l'appareil photo dont, pour rien au monde, il n'aurait voulu se défaire bien qu'en ces circonstances pourtant exceptionnelles il n'eût pas le réflexe de s'en servir.

Peu à peu, cependant, il avançait. Lorsqu'il atteignit la piste carrossable où l'attendait son véhicule, la nuit était tombée. Il était éreinté. Il dévora goulûment le paquet de biscuits ramollis qui traînait sur le siège arrière, démarra son Litte Ace puis, heureux du confort retrouvé, du siège sec, de l'abri relatif que lui offrait le toit du véhicule, repartit lentement sur la piste.

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