Il aime toujours le mot amour
Ses mots n'existent que dans l'ensemble
complet de leurs relations formelles: masque, frasque, musc, mascotte,
muscat, mescaline, mascara, mascaron, mascaret, vasque, flasque,
basque… fantasque… parfois il s'enivre dans leur alcool.
Des
yeux absents, derrière l'absence froide des yeux, perce un regard
violent comme une lame. La démarche de "Diane"… Tout l'énigme de sa
marche énervante, splendide, belle tendue vers sa victime. Il ne
connaît du monde que ses mots : les mots non dits sont des pages
vierges de silence. Les canons à confettis font pleuvoir sur la foule
leur neige de papiers multicolores. Léger suspens… Pourtant, c'est bien
"Diane" qui vient.
Du moins c'est cela qu'il écrit quand,
soudain, dans cet espace d'hésitation qui sépare deux mots, dans ce
soupçon d'attente, "Diane" s'est évadée, vidée de sa mémoire. "Diane"
n'est plus pour lui qu'une entité abstraite, suite de signes dont
l'unique valeur réside dans leur sélection momentanée et dont jamais il
ne saura rien d'autre. Un immense chien bleu renifle avec délectation
les jupes des masques féminins. Faute de sensations, le monde de ses
mots lui tient lieu de monde. La stridence d'instruments plus étranges
les uns que les autres aiguillonne la foule. De même qu'il ne "sent"
pas vraiment, nul ne peut dire si sa pensée est une pensée réelle.
Ignorant la folie, il ne peut devenir fou, mais manque pourtant de
repères: il n'a plus de "raison" de parler de "Diane", rien qui
justifie une suite…
Charme indescriptible des mots dont il joue constamment: il aime toujours le mot "amour".