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Écrits de Marc Hodges
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23 décembre 2005

Une conversation imprévue (Gilberte 09)

La folie hurle un peu partout, pourtant la ville elle-même semble calme… trop calme… L’air extérieur est lourd, poisseux, une sale journée. Il n’est jamais trop tard : tout doit pouvoir arriver d’un moment à l’autre, le désespoir rampe alentour mais malgré la foule, le foyer est étrangement propre. Carmen s'imagine loin de cette réception, nue, au soleil, allongée au bord d'une plage déserte, absente de tout ce monde qu’elle se sent contrainte de fréquenter… Elle vit dans une certaine urgence, aimerait que des mains se posent plus souvent sur elle, rêve d'amours absolues. Depuis qu’elle est là, sa tête s’est emplie de phrases saisies au hasard des conversations ou des émissions diffusées par les téléviseurs: «la ville entière ne cesse de parler d'un assassinat qui aurait été commis la veille dans le quartier résidentiel.» ou encore : «le chaos révolutionnaire des événements contribue à l'impression générale de folie que la population ressent avec force»; mais la couardise est ce qu'elle connaît le moins et tout cela, au fond, n’aurait pas pour elle une grande importance si elle ne se sentait pas, à plusieurs titres, directement concernée…

Elle n’a encore fait que quelques pas dans le foyer quand elle tombe sur Don Juan.

Il lève la tête, la voit, s’adresse à elle comme s’il la connaissait, comme s’il connaissait ses pensées et poursuivait un dialogue depuis longtemps commencé: — Comprenez-vous ce que tout cela signifie? — De quoi parlez-vous? demande Carmen surprise. — Qu’attendez-vous encore de la vie? de l’amour… de la mort ? Qu’en est-il maintenant de nous? — Avec ou sans nous, le monde est le monde, il continue ses plus ou moins sales petites actions, nous ne sommes en lui que des phénomènes transitoires sans réelle importance. — Pourtant! — Oui, pourtant… pourtant?

Ils se regardent surpris de cette conversation, de ce lieu où elle les mène sans qu’ils en soient vraiment maîtres. Elle regarde Don Juan tout en craignant de capter son regard: son visage est fin, délicieux, encadré par une chevelure souple d'une noir profond et, par ce qu’il traduit de décision, de force de caractère, elle sent qu’elle aimerait qu’il l’aime. Carmen n’est attirée que par les êtres de certitude et, c’est d’eux seuls qu’elle veut être aimée même si ce désir d’absolu reste davantage une construction intellectuelle qu’un besoin de son corps.

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